Avril 2021 – avril 2022
LA VILLA ARSON ACCUEILLE EN RÉSIDENCE PENDANT UN AN L’ARTISTE ALEXIS CICCIÙ.
EN SUIVANT LE COURS DES SAISONS, IL DRESSERA L’INVENTAIRE DE LA BIODIVERSITÉ DU JARDIN.
Sorti de l’ESAAA à Annecy en 2010, Alexis Cicciù a toujours été attiré par la performance. Il mène un travail dans lequel il interroge l’organisation des différents mondes animaux et des sociétés humaines, tout en induisant des interactions entre nature et culture.
« Le vecteur entre ces univers est donné par une pratique de la performance, relayée par la sculpture. Au cours de mes actions, j’ai souvent été amené à me glisser dans la peau du chaman dans le but de renouer avec une certaine idée de la mythologie à travers des rituels que j’invente sur une base ethnologique. Si le chaman opère dans le quadrillage de son espace cosmologique, il est aussi investi d’une mission curative qui retient mon attention en cela qu’elle est pré-scientifique. Ainsi, ma démarche se nourrit aussi bien de principes magiques que d’avancées scientifiques.
Mon objectif est de sonder les structures de ces différents espaces et d’amener les sens et l’esprit à passer d’un monde à l’autre, avec toutes les différences d’échelle que cela peut impliquer. »
La résidence
« Mon projet pour cette résidence à la Villa Arson est de faire l’inventaire de la biodiversité du jardin. Ce projet durera une année pour pouvoir suivre le rythme saisonnier du biota.
Dresser un inventaire biologique est un moyen de vivre et comprendre un lieu. C’est une façon d’accéder à sa structure en la décortiquant, élément par élément, puis en la classant et en la
conservant. Les pièges et l’optique que j’utilise ne s’adressent pas seulement à l’humain mais aux sens des êtres qui nous entourent. Ils servent de passerelles entre des mondes autres. Ils amènent l’humain
à écouter, à voir et à sentir comme l’autre. Ce sont des outils de traduction. Ils forcent notre immersion dans des perceptions qui nous sont radicalement étrangères. Tous ces outils du recensement, les actions et résultats associés m’apportent des formes et des couleurs, des motifs, des sujets à explorer dans le champ de l’art, qui s’en trouve élargi au niveau des stimulis humains et non-humains.
Le jaune de la fleur n’est plus seulement là pour le plaisir du globe oculaire mais séduit aussi les ommatidies*.
Tel appât diffuse une odeur qui représente une attraction pour tel type de mouche alors que repoussant pour l’humain.
Telle lampe émet une longueur d’onde lumineuse qui représente un indice de direction pour le papillon alors qu’elle est invisible à l’homme.
Tel microphone permet d’enregistrer le chant de chasse et de repère dans l’espace de la chauve-souris alors qu’il est habituellement inaudible à nos oreilles.
Le paysage offert par l’institution artistique n’est plus orthogonal mais atteint de multiples dimensions, faites d’interstices, de niches ayant chacune leur échelle physique et temporelle autonome, tout en étant intimement liées. »
*Chacune des unités optiques élémentaires formant l’œil composé des arthropodes.
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Photo : Alexis Cicciù