Exposition d’étudiants et de diplômés de la Villa Arson du 22 janvier au 9 février 2014 à Braunschweig ( Allemagne)

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Sur une proposition de Burkard Blümlein, Frédéric Clavère et Thomas Golsenne.

Avec : Jeanne Berbineau Aubry, Chloé Ribadeau-Dumas et David Perréard, Tanguy Beuderley et Raphaelle Serre, Quentin Euverte, Guillaume Gouerou, Éric Laguigné, Paul Le Bras, Quentin Spohn et Julien Ziegler, Yao Qingmei.

Braunschweig, ORT raumLABOR
Hamburger str. 267
22 janvier – 9 février 2014
Vernissage le 21 janvier à 19h

En 2013, dans le cadre de l’Unité de Recherche « Bricologie » mis en œuvre à la Villa Arson, Burkard Blümlein, professeur de sculpture, Frédéric Clavère, professeur de peinture et Thomas Golsenne, professeur d’histoire de l’art, ont élaboré un projet de collaboration avec la Haute Ecole d’Art de Braunschweig en Allemagne, représentée par Wolfgang Ellenrieder, professeur de peinture, Andreas Bee, professeur d’histoire de l’art, Raimund Kummer, professeur de sculpture.

La bricologie est l’étude des manières de faire exister une œuvre d’art, qu’elles relèvent du bricolage manuel, du savoir-faire artisanal, de la production industrielle, de la délégation, ou de l’élaboration d’une chaîne opératoire qui mélange ces différentes possibilités. Une école d’art est un lieu où l’on apprend à explorer ces possibles. Mais ils sont rarement questionnés pour eux-mêmes, comme les choix techniques auxquels se livrent les artistes, souvent peu interrogés par les critiques d’art et les commissaires d’exposition.

Organiser une exposition sur la bricologie de deux écoles d’art ayant chacune une forte identité était une façon de soulever ces questions, en utilisant la méthode comparative.

Il s’agissait de réfléchir aux cultures techniques propres aux deux écoles : leur équipement en matériel, en machines, leurs ateliers techniques, le rôle de l’apprentissage technique dans la pédagogie, l’environnement industriel, culturel et artistique, la tradition philosophique des deux pays – autant de différences qu’on devait pouvoir sentir dans le travail produit par des étudiants ou des diplômés des deux institutions.

Pour établir un dialogue – à distance – entre ces deux milieux bricologiques, il a été décidé d’organiser deux expositions en miroir. La première, qui a lieu à Braunschweig, réunit des étudiants et des diplômés de la Villa Arson. La seconde réunira à Nice un groupe de diplômés de l’école de Braunschweig. Ainsi, les pièces exposées, produites dans l’école d’où sont issus les exposants, et achevées pour certaines dans l’école où se tient l’exposition, fourniront un panel représentatif des possibilités techniques offertes par chaque école.

 

Pour ce premier volet, les étudiants et diplômés de la Villa Arson ont conçu exprès des propositions nouvelles, longuement préparées.

Le trio formé par Jeanne-Berbineau Aubry, Chloé Ribadeau-Dumas et David Perréard s’est intéressé aux tutoriels qui fleurissent sur internet grâce auxquels n’importe qui peut expliquer comment fabriquer n’importe quoi. À partir de ces vidéos instructives et parfois loufoques, les trois étudiants ont élaboré une procédure complexe inspirée des cadavres exquis surréalistes, pour fabriquer une chaîne d’objets extraits de ces tutoriels mais dépossédés de leur fonction première, dont le l’activation s’enchaîne à la manière du film de Fischli et Weiss, Le Cours des choses.

Tanguy Beuderley et Raphaelle Serre se sont penchés sur le cas des coffres-forts, objets ultra-technologiques et impossibles à reproduire avec des moyens individuels. Remarquant leur analogie formelle et conceptuelle avec certaines œuvres d’art à secret comme À bruit secret de Marcel Duchamp ou les coffres sans ouverture de Ryan Gander, ils ont élaboré une boîte en bois dont le mécanisme d’ouverture est caché, comme un casse-tête.

Quentin Euverte a profité d’un séjour de plusieurs mois à la HBK Braunschweig pour se familiariser avec les ateliers techniques de l’école et son contexte culturel et industriel. Remarquant l’importance des usines Volkswagen dans l’économie et la culture de l’école, il s’est intéressé aux plans de construction des voitures, dont il détourne la fonction première pour les transformer en plans de distillateurs d’alcool, qui pourraient fabriquer du Jägermeister, le célèbre spiritueux local.

Guillaume Gouerou travaille dans un registre complexe qui mêle références minimalistes, géométrie pythagoricienne et bricolage expérimental. Pour Bricologie, il propose un « métatron », un rhombicuboctaèdre en métal qui sert d’armature à un four micro-ondes construit par ses soins. L’objet quotidien est transformé en figure cosmique et ses ondes calorifères en émanations spirituelles.

Éric Laguigné est photographe, comédien, agronome et sculpteur. Pour ce projet, il est parti d’une hypothèse technique étrange : peut-on réaliser un éboulis de métal ? C’est dans l’expérimentation matérielle qu’il cherche une réponse à cette question. Dans son « work in progress », il renoue avec les fondements de l’art processuel d’un Robert Morris, et choisit de s’ouvrir pleinement aux possibilités offertes par les ferrailleurs de Braunschweig et les joies de l’improvisation.

Le travail de Paul Le Bras est celui d’un bricoleur virtuose et raffiné, qui réussit à associer la subtilité de dispositifs techniques très précis à l’évidence efficacité de leur impact visuel. Les propriétés du verre, de l’eau et autres matériaux qui permettent de manipuler la lumière sont l’objet de toutes ses attentions du moment. Traverser une goutte d’eau par un rayon laser, découper un tube de verre comme s’il s’agissait d’une feuille en papier ou encore transformer une bâche suspendue en énorme lentille grossissante sont quelques unes des propositions qui vont dans ce sens.

Quentin Spohn et Julien Ziegler sont deux peintres figuratifs au style aussi différent que singulier. Ils ont choisi de collaborer ensemble pour Bricologie afin de jouer sur cette différence et de l’exacerber, en multipliant les techniques et les matériaux, tout en tâchant de produire un effet d’ensemble cohérent. Leur choix s’est tourné vers la description, en deux grands panneaux, de scènes de vie de la Villa Arson, assez représentatives de l’ambiance de travail qui règne dans les ateliers de l’école d’art de Nice.

Yao Qing Mei montre que la technique peut aussi relever de la fiction. Spécialiste de performances où elle rejoue, ironiquement, des personnages inspirés de la propagande communiste chinoise, elle propose pour Braunschweig un nouveau rôle : celui d’une archéologue qui aurait découvert une poterie chinoise très ancienne, sur laquelle les signes de la faucille et du marteau seraient déjà inscrits. Quelle méthode, quelle technique de déchiffrement des caractères faut-il utiliser pour expliquer la présence apparemment millénaire de ses symboles du communisme ? Tel est l’enjeu du projet de Yao Qing Mei.